«Défilez-vous !» est le mot d’ordre pour ce quatorze juillet aussi ordinaire qu’une victoire française dans une étape du tour de France. Pour cet énième défilé de haute couture consacrant la parade en uniforme des hommes des casernes ((Pas ceux qui ouvrent le bal avec la lance à incendie, les autres ceux qui vivent dans des baraquements.)) , il y aura au moins un invité de marque à connaître l’hymne national sur le bout des doigts, à savoir Yves Leterme ((Souvenez-vous l’an dernier lors des célébrations de la prestation de serment.)) . Comme quoi, en dépit de leur grand nombre de banques, les Belges ne prêtent pas seulement à rire mais également attention aux détails les plus subtils de l’hexagone.
Que tout le beau monde invité profite de cette vitrine de la France est largement compréhensible, surtout lorsqu’elle se pare de ses atouts. L’étranger saisit en général la fenêtre d’opportunité qui lui est offerte lorsque le volet militaire lui est présenté dans le cadre des festivités et des soldes d’été. ((Au sujet desquels plus personne ne se berce guère d’illusion puisque le monde entier sait que les Français n’excellent que dans la vente de Mirages.)) Une pareille exposition, une telle débauche d’armements devrait éveiller les sens de ceux qui craignent ces cons de battants qui ornent les meurtrières ou les persiennes et qui au nom de la défense ne font que jeter de l’argent par les fenêtres.
C’est sur les Champs Élysées que les grands de ce monde viennent faire du lèche vitrine, tandis que les petits s’inquiètent simplement du remplissage de leur garde-manger. Que l’on se rassure tout de même, les choses sont bien pensées puisque le défilé a lieu en partant de la place de l’Étoile pour se clore au bas de l’Avenue des Champs-Élysées sur la place de la Concorde, ce qui est un bienveillant signe de paix ((Même si c’est sur cette place que l’on administra les bienfaits d’une légère fraicheur au niveau du cou à toutes ces personnes en guise de dernier souffle.)).
Ce n’est pas pour jaboter, mais si la parade avait lieu sur l’avenue de la Grande-Armée vous ne verriez pas au final la place de la Concorde mais bel et bien se profilant au loin la grande arche de la Défense, chose que j’interpréterais comme étant un signe de mauvais augure pour les paix qui ne se portent pas bien mais qui se portent à gauche comme vous le savez. ((L’épée se porte à gauche, enfin pour peu que vous soyez du genre droitier et en proie à vous livrer à un sport aussi dangereux que l’escrime.))
Oui, à gauche, du même côté que celui auquel on vous fait passer l’arme lorsque les choses ne sont pas allées du tout comme vous le pensiez, comme lorsque l’on est sur le sentier de la guerre qui est la voie cauchemardesque par excellence, et non pas la voix avec un x ((Ou avec plusieurs ‘x’ si l’on considère que le défilé inclut des élèves de Polytechnique, cette école bien connue sous le nom de X et qui a accouché de nombreuses élites dont on peut difficilement qu’il s’agit de grandes inconnues.)) car vous savez bien que l’armée n’en a pas vraiment puisque c’est celle que l’on a longtemps appelé la grande Muette. Autant de bonnes raisons de laisser parler la poudre, celle du feu d’artifice bien sûr, et d’ignorer cette insolente manifestation militaire au profit d’autres commémorations pas forcément plus joyeuses comme celles du départ de Léo Ferré, dont j’aime toujours son «Regardez les».