L’école pingouinière



Mesdemoiselles, mesdames et messieurs,

Alcidées, Alcidés,

Alcide de Corneille, Régis Loisel,

et vous mésanges que j’ai le coeur de vous affubler de noms d’oiseaux.

Bonsoir ! Si j’attire votre attention de la sorte, c’est pour vous parler d’éducation. Et pas de n’importe laquelle, mais de celle que j’ai reçue. Sachez que chez les pingouins, on n’a jamais parlé de l’école de Ferry, car-ferry c’est fait pour traverser la Manche, et comme vous le savez tout ce qui concerne les manchots est dépourvu d’intérêt pour nous les alcidés.

Mais, surtout sachez, que pour le pingouin moyen, se rendre à  l’école fait partie des meilleurs moments de sa vie, car il peut profiter de l’éducation de ses aînés dans la joie et la bonne humeur saisonnière.

Moi, petit, j’aimais aller à  l’école, non pas pour m’y instruire mais pour m’y faire des ami(e)s. J’avais bien tort, j’aurais dû faire les deux, mais c’est trop tard maintenant je suis quand même diplômé, on ne m’y reprendra plus à  faire l’école pinsonnière.

Ah comme l’école des petits pingouins me plaisait, surtout le chant, parce que vous le savez, les mômes Piaf ça aime chanter ! Alors nous chantions tout le temps, au gré du vent ; nous chantions si gaiment, si bien, et si juste que les autres oiseaux qui venaient à  la chorale en rougissaient de honte, on les nomma les rouges-gorges d’après la raclée que nous leurs mîmes. Fâchés de cette défaite, les rouges-gorges demandèrent de l’aide aux rossignols. En vain, puisqu’après un duel au soleil avec toît (Etienne, Etienne !), nous contraignîmes ces mêmes rossignols à  retourner hurler avec les chiens-loups dans la catégorie des après-huskies.

L’école, c’était aussi la cour de récré, où l’on apprenait déjà  à  faire le paon devant les filles et à  rabattre leur caquet quand elles ne faisaient rien qu’à  nous embêter. Et puis il y avait aussi la castagne. Si la bave du crapaud n’atteint point la blanche colombe, la salve du pingouin ne craint point sur les branches la sale palombe. Parce que moi les pigeons à  l’école je les attendais de patte-ferme, je leur volais dans les plumes. Si, si, je vous assure, je n’étais pas du genre à  me faire pigeonner par le premier zozo venu.

Hé si tu m’ crois pas, ben tartagueule à  la fin de ma tirade, parce que je ne suis pas une poule mouillée, je suis un pingouin !

A la sortie de l’école, papa maman Pingouin venaient me chercher et me demandaient ce que j’avais appris dans la journée. Je leurs narrais alors avec quelle volonté mes charmants enseignants m’instillaient le fruit de la connaissance. Eux, je les respectais profondément, ils s’évertuaient à  faire en sorte que nous ne quittions pas l’établissement avec une cervelle de moineau. Ils nous apprenaient vraiment tout plein de choses, d’ailleurs, ne vous choquez pas si je vous dis qu’on nous apprenait à  voler, surtout si je vous dis que j’avais un professeur qui s’appelait monsieur Arabe (c’est vrai en plus, et je l’adorais), c’était vraiment quelqu’un de très bien (ça aussi c’est très vrai, et je lui rends hommage, il est le phénix des hôtes de ces bois). Oui, il nous apprenait à  voler, mais à  voler de nos propres ailes. Vous avez vraiment l’esprit mal tourné, vous les humains. Mais regardez donc plutôt les manchots, ces drôles d’oiseaux, on ne leur a pas appris, et ce sont eux qui ont mal tourné. Vous pensez que je dis des bêtises, et que je suis médisant avec les empereurs ? Ah bon ? Hé bien, si jeune ma buse l’on voit que vous n’avez encore jamais entendu parler du bandit manchot, vous.

Ah l’école ! J’y retournerai bien volontiers. Je me souviens quand chemin faisan, je faisais cygne à  une bécasse qui me narrait les exploits de sa cousine, Chantal Goya qui d’ailleurs continue de sévir. Mais qu’à  cela ne tienne, elle au moins n’a jamais entendu faire de nos bambins des machines à  tuer, même si aujourd’hui encore je m’inquiète de son influence manifeste à  militariser les lapins de garenne.

C’était le bon temps, où nous hérons ivres comme des grives gorgées de raisin mûr ! Qu’est ce que c’était chouette de reparler de tout ça ! C’est gai comme un pinson que je vous quitte, de peur de vous voir bailler aux corneilles ou de vous avoir gavés comme des oies.

Au revoir,

Monsieur Pingouin.


5 réponses à “L’école pingouinière”

  1. ecole fait partie des meilleurs moments de sa vie, j’ai du mal à  comprendrd, j’avoue 🙂 en tout cas merci pour de billet intéresssant ! c’est toujours sympathique de passer surb ce blog 🙂

  2. Monsieur PINGOUIN,
    Cela fait maintenant deux semaines que j’ai découvert votre site.
    Cela fait deux heures ce soir que je passes de la page « Qui a franchit le RUBICON? » à  « l’école pingouinière » en musant, m’égarant, sur les liens émaillant ces chroniques…

    Je voulais vous remercier pour le moment jubilatoire que j’ai eu à  vous lire, le même qu’à  la découverte de QUENEAU, du « dictionnaire superflu » , de « la fée carabine » ou du « petit nicolas », vous vous rappellez, pas celui qui franchit le RUBICON, celui que vous avez du croiser à  l’école pingouinère?

    Votre désormais accroc,

    Koncombre Musqué

    PS: Merci de ne pas me cafter à  la maîtresse !

  3. Cher Koncombre Musqué,
    Je suis ravi d’apprendre que vous avez apprécié ces chroniques, cela me va droit au cœur.
    J’espère que les prochaines chroniques vous plairont aussi, et rassurez-vous je ne dirai rien du tout à  la maîtresse.

    Bien à  vous,

    Monsieur Pingouin.

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