Non, cher lectorat, ce n’est pas de Ségolène Royal dont il est question, mais de quelqu’un d’autre. D’ailleurs s’il avait été question d’une ancienne candidate dans ce billet, il y aurait eu un ‘e’ à la fin du titre. J’en conviens que c’est immédiatement beaucoup moins intéressant pour l’anti-ségoléniste primaire ou pour ses dévoués militants en manque d’avenir, cependant le sujet de ce billet, Raja Petra Kamarudin, est rarement évoqué en tant que tel puisqu’il est de noble extraction. C’est une des raisons pour lesquelles je pense que s’il avait un côté pingouin il pourrait dire : «Ce n’est pas pour jaboter, mais je ne suis pas insultant, je suis plutôt bon prince.»
En effet, RPK, de son petit nom, en dehors d’être le neveu de feu le sultan du royaume de Selangor, est un blogueur politique qui sévit dans une monarchie constitutionnelle appelée la Fédération de Malaisie. Là , je vous arrête tout de suite. Je sens l’envie grandissante chez certains d’entre vous de faire des petits jeux avec le mot malaise, mais comme je n’en ai cure vous ne pourrez invoquer ces bien grands maux. Son site Malaysia Today, qui fait baver les publicitaires avec son million et demi de hits quotidiens ((Un million et demi de hits en Malaisie, qui compte vingt-quatre millions d’habitants, me semble être un superbe score.)) , héberge – outre ses billets d’humeurs – le contenu d’autres blogueurs d’opposition ((Certains blogs sont tenus en malais et d’autres en langue malaise.)) .
En effet, au vu de l’audience, on peut en conclure à juste titre que Raja Petra n’en est pas à son premier coup, et vous ne serez pas surpris d’apprendre que c’est un récidiviste. Non, je ne vous parle pas tout de suite de sa récente visite dans l’une des cases les moins prisées du Monopoly, mais bien du fait qu’il s’était distingué auparavant en tant que webmestre du site Free Anwar Ibrahim. Anwar Ibrahim, du nom de l’ancien vice-Premier ministre incarcéré ((Anwar Ibrahim a retrouvé la liberté et été blanchi en 2004, après avoir été condamné d’abord pour une durée de six ans pour des charges de corruption en 1999, et ensuite en 2000 pour une durée de neuf ans pour avoir plus que joué à touche-pipi avec des messieurs.
Pourquoi avoir insisté lourdement sur la seconde peine qui, outre d’étonner l’occidental au sujet de la hiérarchie des délits dans le monde malais, est d’ailleurs plus lourde que la première ? Essentiellement afin de le discréditer aux yeux de son électorat le plus pieux, parce que cet homme politique avait été président d’un mouvement estudiantin musulman moraliste réputé critique envers le gouvernement avant de rejoindre – à la grande surprise de ses condisciples – le parti de la majorité, l’UMNO.
Si vous avez du mal à saisir la comparaison, pour le lectorat soixante-huitard imaginez Daniel Cohn-Bendit rejoignant le RPF ; pour les plus jeunes, imaginez Bruno Julliard prenant la carte de l’UMP. Si vous appartenez à la frange la plus âgée de mon lectorat, vous, à vôtre âge vénérable, vous ne pouvez plus vraiment être surpris. Enfin si vous êtes Che Det, en débauchant Anwar Ibrahim vous aviez joué là un de vos plus beaux coups politiques puisque vous avez privé le PAS d’un élément potentiel.)) après un procès très suivi et très controversé et dont le principal accusé aujourd’hui s’évertue à montrer la partialité de la plupart des juges en fonction à l’époque dans ce que la presse devrait appeler le Lingam Gate.
Vous l’aurez compris, Raja Petra Kamarudin, est un membre indépendant de l’opposition même s’il n’est pas encarté au PKR, le parti populaire pour la justice ((Parti Keadilan Rakyat, qui est le parti dirigé par Wan Azizah Wan Ismail, l’épouse d’Anwar Ibrahim qui lui chantait souvent du Daniel Balavoine. En effet «Wan Azizah, je te veux, si tu veux de moi.» seraient les propos qu’Anwar Ibrahim aurait tenus à sa promise avant de la demander en mariage.)) . Notez au passage que les acronymes RPK et PKR contiennent les mêmes lettres, et que si l’on s’amusait à en faire de même avec l’UMP on pourrait vraiment se dire qu’une partie du corps électoral français s’est ongulicisé et que cela fait un an que ses élus jouent aux courses et s’essaient au saut d’obstacle avec plus ou moins de succès selon les dossiers.
S’il est question de RPK aujourd’hui c’est pour souligner non pas le fait qu’il a déjà été condamné à verser la somme rondelette de quatre millions de ringgits pour diffamation à l’encontre de l’université Utara Malaysia et son président Nordin Kardi ((Deux millions à l’université située dans le nord du pays dans l’État de Kedah, et deux autres à Nordin Kardi soit quatre cent mille euros à chacune des parties.)) ; s’il est question de lui aujourd’hui c’est parce qu’il a eu la bonne idée – à mon sens – de créer un fonds de défense des blogueurs dans un pays où le gouvernement peut incarcérer pour une durée indéterminée toute personne impliquée dans ce qu’il juge être des actes de sédition comme l’on en a attribués à RPK dernièrement pour ce billet qui relate cet obscur assassinat. ((Si la manière d’incarcérer en Malaisie vous intéresse, alors Internal Security Act, Sedition Act sont vos nouveaux amis.))
Loin de dresser un parallèle avec certaines affaires qui ont eu lieu dans l’hexagone, il n’en reste pas moins que bloguer ou blaguer ici-même au pays des droits de l’Homme, de la Femme et du petit pingouin est bien plus facile que sous d’autres contrées comme la Fédération de Malaisie.
2 réponses à “Royal ? Insultant ?”
[…] site du blogueur RPK – Malaysia today – est victime de censure. La Malaysian Communications and Multimedia Commission a […]
[…] avait été accusé à tort sont renouvelées. [↩]Relatées en partie dans le billet “Royal, insultant ?” . [↩]5 000 ringgits font environ 1 000 € et un million de ringgits environ 200 000 € […]